Ces livres qui questionnent l’injonction à la maternité

Written by Emilie

25 octobre 2022

Avez-vous déjà entendu parler de l’instinct maternel ? De l’horloge biologique ? De
tous ces concepts qui, sous couvert d’un désir naturel humain, façonnent en réalité une
injonction à la maternité pour toutes les personnes qui ont un utérus ?


En effet, pendant des millénaires, on a mis énormément d’énergie à créer le mythe de l’envie
de parentalité, mais surtout de maternité, comme un besoin viscéral, universel, et donc
commun à toutes les femmes. Pourtant, aujourd’hui, on commence à aborder les notions de
non désir d’enfant, mais aussi de regret parental, pour mettre en lumière cette formidable
injonction à la maternité, injonction qui peut parfois avoir des conséquences terribles.
Les langues se délient, donc : témoignages, études sociologiques, essais journalistiques, se
font de plus en plus nombreux pour casser cette image sacralisée d’une maternité forcément
épanouie, mais surtout, obligatoire !


Aujourd’hui, on vous propose donc une sélection exhaustive de ces ouvrages qui
questionnent l’injonction à la maternité et permettent enfin d’offrir un choix plus large aux
femmes, et ainsi de faire un choix libre et éclairé à propos de leur désir.


C’est quoi, l’injonction à la maternité ?

Quand on parle d’injonction à la maternité, on veut parler du fait que pendant longtemps,
procréer ou non n’a pas fait l’objet d’une réflexion particulière, et que ce manque de
réflexivité et donc de choix, perdure aujourd’hui.
Durant l’Antiquité, les hommes et les femmes sont devenus deux catégories opposées et leur
opposition est devenue un régisseur de la société : les hommes, dont le sexe est brandi
fièrement vers l’extérieur, devrait s’occuper du politique, de la cité, tandis que les femmes
dont le sexe est froid, sombre et humide, justifie qu’elles soient enfermées à l’intérieur, peu
importe qu’elles l’aient décidé ou non.


Bien sûr, il n’y a rien de mal à s’occuper du foyer et des enfants, mais cela devient
franchement embêtant quand ce n’est pas choisi et que c’est dévalorisé !


En effet, les observations du corps ont donné lieu à une naturalisation des rôles en fonction
du genre de la personne, mais en ce qui concerne les femmes, cela a aussi donné lieu à une
précarisation certaine, puisque leurs fonctions ne sont pas rémunérées et donc pas valorisées.
Quoi qu’il en soit, on formule aujourd’hui des réflexions autour du désir d’enfant, qui n’a
rien d’universel ou naturel.

Lâchez-nous l’utérus


Fiona Schmidt est journaliste, féministe et childfree. En 2020, elle publie cette bombe,
Lâchez-nous l’utérus, un essai coup de poing qui permet de théoriser ce qu’elle appelle la
charge maternelle. Pour reprendre sa définition, c’est “la somme des pressions et préjugés au
sujet de la maternité que toutes les femmes intègrent dès l’enfance et qui présentent la mère
épanouie et bienveillante comme la norme, une part intégrante de l’identité féminine, et le
seul lifegoal qui vaille pour une femme”.
Cela passe par les jouets qui sont des poupons pour les filles, par l’injonction à être dans le
soin, le sacrifice de soi, dans l’écoute, puis par les questions redondantes dès lors qu’on
approche la trentaine : “Alors, c’est pour quand?” “L’horloge tourne!”.


J’ai décidé de ne pas être mère


Cet essai à la première personne retrace les réflexions de l’autrice qui, du haut de ses 35 ans,
affirme grâce à ce titre puissant, qu’elle a fait le choix de ne pas procréer. On peut y lire la
longue liste des raisons pour lesquelles Chloé ne pourrait jamais être mère, et honnêtement,
ça fait un bien fou !


Pas d’enfant, dit-elle

Edith Vallée fait partie des premières françaises à avoir écrit sur le sujet du désir de ne pas
être mère, et cet ouvrage est la publication de sa thèse soutenue dans les années 1970.
Dans sa recherche, elle met en avant la diversité des profils de femmes qui ne désirent pas
être mère afin d’ôter la pathologisation autour de ce désir de vie encore mal compris.
Dans un style très différent, Virginia Woolf nous parlait déjà en 1928 de cet enfermement
souvent subi des femmes dans Un lieu à soi, dont nous avons déjà parlé dans cet article !


A noter que si les ouvrages sont encore très peu nombreux en francophonie, ils pullulent aux
Etats-Unis, où l’on peut trouver des dizaines de récits personnels mais aussi d’ouvrages
sociologiques sur le sujet ! Bien sûr, cela n’enlève pas l’injonction à la maternité outre-
Atlantique, mais la parole est en revanche plus libre à ce sujet.


Le regret maternel, ultime tabou

L’autre facette de l’injonction à la maternité est le regret maternel, qui découle en toute
logique du manque de choix mais aussi d’espace mental pour se figurer autre chose que la
maternité. Plusieurs ouvrages parus récemment mettent en lumière cet enjeu.


Le regret d’être mère

En 2015, la sociologue israélienne Orna Donath publie une étude sociologique permettant à
une trentaine de femmes d’exprimer leur regret. On peut y lire notamment que pour certaines,
elles ne savaient simplement pas qu’elles pouvaient avoir le choix ; elles ont fait une famille
simplement parce que “c’est la suite logique”, “c’est comme ça”.

Elles expriment toutes que le problème n’est pas un manque d’amour pour leur enfant, mais
bien un rôle social trop lourd à porter, celui de mère, avec toutes les injonctions
contradictoires qu’il comporte.


La remplaçante

Pour celles et ceux qui préfèrent le roman graphique, La remplaçante, écrite par Mathou et
Sophie Andriansen, retrace les doutes, les regrets, les réflexions intenses d’une mère en post-
partum.

Le regret maternel

Cet ouvrage est sorti en septembre 2022 : il retrace le parcours d’Astrid, qui nous parle du
regret maternel qu’elle ressent, alors même que son enfant a déjà 3 ans.
Ses mots font écho à l’étude d’Orna Donath : le problème qu’elle rencontre n’est pas le
manque d’amour, seulement l’isolement social, le poids du rôle de mère, qui est trop lourd à
porter.


Pour découvrir ces livres, n’oubliez pas de privilégier votre librairie de quartier ou de
commander en ligne sur des plateformes qui soutiennent les libraires indépendants, comme
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